Pas de primaires sans elles, par Natacha Quester-Séméon #JamaisSansElles

Tribune parue dans le Huffington Post.

Nous sommes une majorité de citoyens à critiquer l’absence de renouvellement dans la sphère politique ainsi que dans les directions des entreprises. Dans différentes sphères de pouvoir, ce sont les hommes blancs de plus de 50 ans qui nous dirigent aujourd’hui.

Au cours de ce quinquennat qui s’achève, on nous a beaucoup parlé de parité. Certes, il y a eu quelques progrès, certaines ministres ont été très visibles pendant cette mandature, mais cette image médiatique cache une réalité bien moins brillante. Dans le classement international de la parité dans les parlements, la France a dégringolé, passant de la 36e place à la 60e ! Nous sommes derrière l’Irak et le Pérou. Les formations politiques se contentent bien souvent de faire le service minimum. L’Assemblée nationale n’est pas représentative de la population!

La polémique autour du burkini a été hystérique. On a entendu beaucoup d’hommes exprimer leur point de vue et bien moins de femmes. Comme l’écrit Sylvain Attal: « Plus que jamais, la visibilité des femmes est menacée ».

Ailleurs les lignes bougent. Hillary Clinton est la première femme candidate pour la présidentielle aux Etats-Unis, Barack Obama et Justin Trudeau se clament fièrement féministes! Mais en France, on en parle très peu. Nos hommes politiques sont en retard. On ne peut que déplorer le nombre d’événements ou de rencontres de représentants politiques, syndicaux ou institutionnels où pas une seule femme n’est présente.

Les débats de la primaire de la droite et du centre et de celle de la gauche se mettent en place à la rentrée. Mais où sont les candidates? On le sait, un bon résultat aux primaires peut assurer une place importante dans le gouvernement du parti vainqueur, ce n’est donc pas un détail.

Au PS, on compte une candidate, Marie-Noëlle Lienemann, une seule sur cinq candidats à ce jour. Cécile Duflot, Karima Delli et Michèle Rivasi sont présentes à la primaire d’Europe-Ecologie Les Verts (trois femmes sur quatre candidats), et pour la primaire de la droite et du centre, une femme le sera peut-être… ou peut-être pas! Nathalie Kosciusko-Morizet est toujours en quête de ses parrainages quelques jours avant la clôture des candidatures le 9 septembre. NKM n’a cessé de dénoncer un système contraignant qui freine les candidats émergents. Peut-on imaginer que Les Républicains soient le seul parti sans aucune femme sur une dizaine de candidats?

Qui sont les femmes dans les équipes des principaux candidats (on n’imagine pas non plus que les cercles proches de nos ténors soient uniquement masculins)? On aimerait qu’ils nous les fassent connaître et aussi que les débats politiques dans les médias s’y emploient. Comment peuvent-elles développer leur carrière si les rédactions ne les mettent pas en lumière. Or si elles sont là, c’est qu’elles font leur job, non? Ne pas les occulter serait la moindre des choses, et couperait court par la preuve de l’évidence aux éternels procès en incompétence. Les responsabilités sont donc lourdes à tous les niveaux.

Dans le même temps se joue une autre partie très importante, celle des investitures pour les élections législatives de 2017. Le Haut Conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes appelle les formations politiques à présenter au moins 50% de femmes candidates, et surtout à veiller à ne pas réserver aux hommes davantage qu’aux femmes les circonscriptions réputées « gagnables ». Les partis préfèrent payer des amendes exorbitantes que de respecter la loi et cela ne semble pas choquer grand monde.

Nous pourrons faire tous les débats possibles et imaginables sur la place des femmes en politique, mais si les hiérarchies des partis ne les investissent pas, les portes resteront totalement fermées jusqu’en 2022. Et nous, électeurs, quand nous découvrirons le visage des candidats sur les affichages électoraux, il sera trop tard pour déplorer l’absence de femmes: nous n’aurons pas le choix, et l’immobilisme aura encore une fois gagné.

À moins qu’avec les réseaux, chacun ne prenne la parole pour éviter ce scénario à répétition!

Les états-majors politiques n’en ont pas suffisamment conscience, mais la mixité est un débat qui intéresse les Français, hommes et femmes. Nous le voyons lors de nos déplacements à travers toute la France dans le cadre du mouvement #JamaisSansElles. Le pays est plus ouvert que nos élus. Le monde change, pourquoi pas nous?

Natacha Quester-Séméon, entrepreneure, CEO de l’agence digitale youARhere, co-fondatrice du club des femmes et entrepreneures du numérique Girl Power 3.0. Porte parole de #JamaisSansElles.


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