Discours de Michael Roth – Colloque #JamaisSansElles à l’Assemblée nationale

Discours de Michael Roth, ministre délégué aux Affaires européennes de la République fédérale d’Allemagne. 

Invité d’honneur du colloque « Pour une gouvernance partagée, #JamaisSansElles, la mixité en action« , Hôtel de Lassay, Assemblée nationale, 17 juin 2019.

Chère Tatiana, je me sens vraiment très honoré d’être ici. C’est un grand privilège et j’ai beaucoup appris. Et c’est exactement cela, l’Europe : apprendre les uns des autres, apprendre ensemble pour créer un monde meilleur et s’engager en faveur d’une Europe meilleure. Et je remercie ma nouvelle homologue, mon amie distinguée, Amélie*, de se joindre à nous. (*Amélie de Montchalin, Secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargée des Affaires européennes)

L’année dernière, en septembre, j’ai eu le plaisir d’accueillir Tatiana et son équipe à Berlin. J’ai signé la charte #JamaisSansElles. Depuis lors, j’ai fait de mon mieux pour m’y conformer. Je dois dire que cette charte est un instrument très puissant. Lorsque vous dites : “désolé, je ne peux pas prendre part à cette discussion, car il n’y a que des hommes autour de la table”, il y a encore des gens qui pensent que vous ne le dites pas sérieusement. Mais comme vous ne lâchez pas, ils finissent par comprendre. Et ils changent leur organisation. Parce que ce n’est pas si compliqué de trouver des femmes intelligentes et compétentes et finalement, cela fonctionne et apporte des changements. Alors merci pour ça.

L’engagement #JamaisSansElles est une question de justice. Si la moitié de l’humanité n’a pas son mot à dire, quelque chose ne va pas. En ce sens, l’appel #JamaisSansElles est une question de représentativité équitable. Comme tu l’as dit, chère Tatiana, c’est une question d’humanisme. Et ici, je voudrais clarifier une chose, car je connais beaucoup d’hommes qui pensent que de telles initiatives les prennent pour cible et les excluent. Or, #JamaisSansElles n’est pas contre les hommes. #JamaisSansElles est pour les hommes avec les femmes. Il ne s’agit pas d’exclusion, mais d’inclusion. L’idée même est de se réunir et de mieux travailler ensemble. En fait, ce n’est pas seulement une question de principe. Avoir des femmes à bord, promouvoir la gouvernance partagée, c’est aussi un gage d’efficacité. Car quand nous réunissons différents points de vue, les choses fonctionnent mieux. Lorsque nous prenons en compte toutes les perspectives, toutes les implications d’un problème, les décisions qui en résultent sont meilleures, plus justes et plus durables.

Je tiens très particulièrement à rendre l’Europe et la politique en général plus colorées, plus diversifiées et bien sûr, plus féminines. Le nouveau Parlement européen comptera 39% de femmes parmi ses membres, contre 36% lors de la précédente assemblée. Cela progresse lentement mais cela progresse tout de même. Nous aurions espéré une Assemblée plus équilibrée entre les genres, mais nous devons également reconnaître les progrès réalisés, aussi limités soient-ils. La prochaine équipe dirigeante à Bruxelles devra être à la hauteur des défis sur cette question. Il est crucial que les postes de haut niveau à Bruxelles soient pourvus sur la base de l’égalité des genres. C’est ce qui est entre nos mains en ce moment : se battre, à notre niveau, pour une politique européenne féministe.

Une question centrale est celle de la “budgétisation sensible au genre” (“gender budgeting”), car l’égalité commence par la politique budgétaire. Par exemple, si vous dépensez plus d’argent dans des projets dans le secteur de l’agriculture ou des infrastructures, cela profitera probablement davantage aux hommes qui sont traditionnellement surreprésentés dans ces secteurs. En revanche si vous réduisez les fonds publics dans le secteur des transports locaux, cela aura tendance à toucher davantage les femmes. La “budgétisation sensible au genre“ semble compliquée, mais en réalité c’est assez simple. Nous nous engageons à vérifier chaque problématique avec attention. Quel est le groupe cible qui profite [des investissements] ? Et sont-ils équitables pour les deux sexes ? Je crois vraiment, chers amis, que nous devrions suivre au niveau européen l’exemple de nos collègues suédois qui ont déjà réalisé des progrès importants dans ce domaine.

Ensemble, nous avons mis le nouveau budget stratégique de l’Union européenne sur la voie de l’égalité des genres. Au Conseil, nous avons clairement indiqué que les actions des programmes de l’UE doivent intégrer la dimension de genre. En termes de politique extérieure, nous avons traduit notre engagement en chiffres concrets : 85% de nos futurs programmes externes devront viser l’égalité des genres comme objectif prioritaire. Cela devrait entraîner des changements structurels pour promouvoir l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes et faire de l’égalité des genres l’une des caractéristiques de l’action extérieure de l’UE à l’avenir.

Participation égale des femmes, gouvernance partagée, ce n’est pas une question accessoire, ce n’est pas une problématique secondaire, elle est au cœur même de nos valeurs communes et fondamentales de l’Europe. Dois-je rappeler que l’égalité entre les hommes et les femmes est explicitement mentionnée à l’article II du traité sur l’Union européenne ainsi que dans la charte des droits fondamentaux ? Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir et la route n’est pas facile. Il est particulièrement inquiétant de voir qu’à l’heure actuelle, certains hommes politiques, certains chefs d’État et de gouvernements, en Europe et dans le monde, remettent en question les progrès accomplis au cours des dernières décennies dans le domaine des droits et de la participation des femmes. Ce n’est pas le moment de baisser la garde. Nous devons rester vigilants. Nous devons rester attentifs. Et pour cela, nous devons rester unis et nous appuyer sur des outils pertinents. Je voudrais encore une fois remercier Tatiana et #JamaisSansElles pour le merveilleux outil qu’elles nous ont fourni. Nous devons continuer ensemble #JamaisSansElles et #JamaisSansEux.


Colloque #JamaisSansElles : « Pour une gouvernance partagée » à l’Assemblée nationale

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.